Lettre n° 132 – NOVEMBRE 2023

Quelles sont les thématiques de recherche sur lesquelles vous travaillez ?

Mes recherches, qui portent sur les relations entre humains et animaux d’un point de vue de sciences sociales, se sont développées dans quatre directions complémentaires :

Le volet le plus récent de mes travaux porte sur la dimension sociale des questions de santé globale (One Health), en réfléchissant notamment à sa généalogie (la façon dont la question est cadrée et par quels acteurs), aux types de savoirs mobilisés dans l’analyse des circulations zoonotiques et la façon dont sont produites les recommandations de santé globale.

Un second volet de mes recherches porte sur la place des animaux en ville, et plus largement de la nature en ville. Je m’intéresse en effet à la façon dont les espaces urbains sont produits et gérés avec une attention renouvelée au vivant (pratiques d’éco-pâturage, aux jardins partagés et aux relations diversifiées aux animaux dans les espaces urbains).

Une troisième dimension de mes travaux s’inscrit dans le projet collectif ANIMORT, qui cherche à documenter et objectiver l’influence de la publicisation des débats sur les pratiques de mise à mort des animaux (MMA).

Enfin, un quatrième axe de travail m’a amené à réfléchir à la façon dont le travail peut être une façon de conceptualiser nos relations aux animaux et plus largement aux vivants (certains animaux travaillent-ils ? certains animaux sont-ils mis au travail ?).

Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?

Je travaille essentiellement sur le projet collectif ANIMORT, qui cherche à documenter et objectiver l’influence de la publicisation des débats sur les pratiques de mise à mort des animaux (MMA). Assiste-on à l’émergence d’une norme unifiée, hégémonique et globale en termes de MMA, qui s’imposerait à des situations locales hétérogènes ? Ce projet porte sur la comparaison de trois types de pratiques professionnelles exemplaires dans leur rapport à la mise à mort, dans trois contextes différents : Tunis, Paris, Pondichéry, où les normes liées à la mise à mort sont inégalement implantées et recomposées.

Je m’intéresse également à l’extension de l’activité domesticatoire à l’âge de l’Anthropocène. Au-delà de la liste stricte qui définit les espèces domestiques, des actions aussi variées que l’aménagement de réserves naturelles, les actions d’ensauvagement ou l’émergence d’un modèle normatif de relation anthropozoologique, fondé sur la figure de l’animal de compagnie, permettent de penser les reconfigurations de nos relations aux animaux.

A quoi souhaitez-vous contribuer avec vos recherches ?

La place des animaux dans nos sociétés a progressivement émergé comme une question publique ces deux dernières décennies avec des discours militants qui cadrent de plus en plus le débat. Nous sommes par ailleurs dans un moment de crise écologique majeure avec une sixième extinction de masse largement amorcée, qui se traduira probablement par des ruptures anthropologiques significatives (les humains ont co-évolué avec une myriade d’espèces vivantes qui sont de moins en moins présentes).
Dans ce cadre, il parait particulièrement important de documenter les transformations des relations anthropozoologiques et d’apporter des éléments nuancés dans des débats qui sont souvent très polarisés (notamment autour du bien-être animal ou de la mise à mort).
Au-delà de mon activité de publication et de communication scientifique, j’essaye ainsi de régulièrement intervenir dans des cadres légèrement différents (présentation dans des médiathèques, auprès d’associations ou d’élus, dans la presse généraliste).

Quelle est votre formation ?

Je suis géographe de formation, avec des sensibilités qui sont proches de la géographie sociale et des questions environnementales. J’ai aussi beaucoup travaillé avec des anthropologues et, de manière plus récente, avec des vétérinaires, des médecins, des infectiologues dans le cadre des travaux du DIM One Health.

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