L’atelier 6 du Ladyss, Spatialité des vivants, du geste intime aux façonnages collectifs des milieux, organise, le jeudi 19 février, une journée thématique consacrée à l’océan.
Longtemps appréhendée, dans le champ de la pensée écologique, à travers la catégorie générale d’« environnement », la mer – en tant qu’espace, matière et relation – appelle cependant à être considérée à partir de ses spécificités ontologiques (Steinberg & Peters, 2019)
et de ses effets transformatifs (Helmreich, 2007), qu’ils soient biologiques, esthétiques ou épistémiques. Ces caractéristiques en font un objet d’étude à part entière pour penser les crises écologiques contemporaines. Cette reconfiguration, que certain·es nomment le « tournant
océanique » (Deloughrey, 2017), implique une réorientation des sensibilités, des savoirs et des pratiques, plaçant depuis peu l’océan au centre de l’attention scientifique, politique et sociétale.
En France, les enjeux littoraux et maritimes – constituant le deuxième espace maritime le plus étendu au monde, dont 67 % se situe bien loin de l’hexagone dans le Pacifique – font l’objet d’une mise à l’agenda politique de plus en plus rapide, illustrée notamment par l’organisation
du One Ocean Summit à Brest en février 2022, ou encore par l’accueil de la troisième Conférence des Nations Unies pour l’océan à Nice en juin 2025. Sur le plan scientifique, l’ampleur des moyens mobilisés pour la production de savoirs sur l’océan témoigne d’un sentiment d’urgence : des campagnes de financement massives ont donné naissance à un Groupement de recherche Océan et Mers, à un Programme Prioritaire de Recherche « Océan et Climat », ainsi qu’à trois Programmes et Équipements Prioritaires de Recherche (PEPR).
Le niveau de concernement des citoyen.nes se manifeste également à travers une densité d’actions menées pour protéger et défendre les milieux littoraux et marins. Les effets des bouleversements écologiques et sociaux liés au changement climatique y sont déjà perceptibles
au quotidien : effondrement de la biodiversité marine impactant la viabilité des petites pêcheries, pollutions terrigènes affectant les écosystèmes, la qualité de l’eau et la santé humaine, artificialisation et sur-tourisme littoral contribuant à la crise du logement pour les
populations les plus modestes, etc.
Face à cet engouement général pour l’océan, inscrit dans un programme d’actions axé sur sa protection, sa gestion et sa durabilité – et dans une perspective de renouvellement des méthodologies en sciences sociales et en humanités écologiques, souvent en dialogue avec les arts et la création –, des travaux scientifiques soulignent la persistance de représentations océaniques structurées par des logiques extractives et productivistes. Celles-ci s’opèrent au détriment de formes alternatives de savoirs et d’expériences, perpétuant des processus
d’invisibilisation des enjeux océaniques.
Cette journée vise à interroger les constructions contemporaines de l’océan, à partir de démarches académiques, artistiques et militantes. Elle propose d’examiner les différents processus d’invisibilisation, qu’ils soient volontaires (stratégies commerciales relevant de la publicité, politiques de captation et d’orientation de l’attention) ou involontaires (absence ou marginalisation de collectifs alternatifs), qui participent à figurer l’océan sous une forme «liquide », au sens d’une ressource extractible, capitalisable, mise au service des dynamiques
productivistes et marchandes (Blythe et al., 2023; Neimanis et al., 2013).
Nous aborderons également les régimes de visibilité induits par ces représentations (notamment celui consistant à « rendre visible la disparition de l’océan »), les modes de production des connaissances, les violences structurelles liées aux pratiques marines, l’esthétisation de la catastrophe, la sublimation des milieux, ou encore les narratifs océaniques liés à l’extinction
de la biodiversité marine.
Les interventions proposées chercheront ainsi à aborder l’océan à travers ses représentations – matérielles, symboliques, techniques, imaginaires – ainsi que ses expériences vécues, sensibles et incarnées, ses pratiques et ses transformations. Une attention particulière sera portée aux articulations entre les corporéités de l’expérience et les spatialités dans lesquelles elles s’inscrivent.
Bibliographie
Blythe, J. L., Gill, D. A., Claudet, J., Bennett, N. J., Gurney, G. G., Baggio, J. A., Ban, N. C., Bernard, M. L., Brun, V., Darling, E. S., Franco, A. D., Epstein, G., Franks, P., Horan, R.,Jupiter, S. D., Lau, J., Lazzari, N., Mahajan, S. L., Mangubhai, S., … Zafra-Calvo, N. (2023).
Blue justice: A review of emerging scholarship and resistance movements. Cambridge Prisms: Coastal Futures, 1, e15. https://doi.org/10.1017/cft.2023.4
Deloughrey, E. (2017). The oceanic turn : Submarine futures of the Anthropocene. Comparative literature, 69(1), 32 à 44.
Helmreich, S. (2007). An anthropologist underwater: Immersive soundscapes, submarine cyborgs, and transductive ethnography. 34(4).
Neimanis, A. G., Chen, C., & MacLeod, J. (Éds.). (2013). Thinking with Water. McGill Queen’s University Press.
Steinberg, P., & Peters, K. (2019). The ocean in excess: Towards a more-than-wet ontology.
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Jeudi 19 février 2026, Université Paris Cité, Bâtiment Olympe de Gouges – Salle M19
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Vendredi 28 novembre 2025 à 14h30, Campus Condorcet Bâtiment de Recherche Sud, Salle 0.019 RDC & à distance (cliquer sur "lire encore")
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Mercredi 19 novembre 2025 à 14h00, Université Paris 8, Espace Deleuze, Bâtiment A, Salle des thèses
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Vendredi 14 novembre 2025 à 13h30, Université Paris Cité, Bâtiment Olympe de Gouges, Salle 105 (1er étage)
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Jeudi 13 novembre 2025, de 14h00 à 15h30, en distanciel (voir "lire plus" pour le lien Zoom)
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Jeudi 06 novembre 2025 à 14h30, Université Paris 8, Maison de la Recherche Salle A2-201
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Vendredi 10 octobre 2025, Université Paris Cité, Bâtiment Olympe de Gouges , Campus Grand Moulin, Salle 209
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Lundi 06 octobre 2025, Campus Condorcet, Aubervilliers
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Vendredi 5 septembre 2025 à 10h, Université Paris Cité, Hall aux Farines, Salle 580F (monter l'escalier F)